Virgile
Mosaïque de Virgile, accompagné des muses Clio et Mepomène, découverte en 1896 à Sousse, Tunisie, Musée National du Bardo
Virgile, de son nom complet Publius Vergilius Maro, naquit vers -70 av. J-C à Andes, un petit village proche de Mantoue, en Lombardie. Selon la tradition, ses parents seraient de modestes agriculteurs. Il semblerait qu'en réalité, sa famille soit issue de la bourgeoisie. Son père étant propriétaire terrien, il profita malgré tout d'une enfance ancrée dans les réalités rurales. Cette jeunesse à la campagne a probablement contribué à forger son amour pour la nature et l'agriculture, des thèmes récurrents dans ses poèmes ultérieurs.
© 2019 RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Mathieu Rabeau
Virgile, 1475/1500 (4e quart du XVe siècle, École de Gand, Just de Burrugete, Pedro, MI 652 ; Campana 388, Département des Peintures, Musée du Louvre, Paris
© 1996 RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Hervé Lewandowski
Virgile, 1861, Thomas, Gabriel Jules, France, RF 2224, Département des Sculptures du Moyen Age, de la Renaissance et des temps modernes, Musée du Louvre, Paris
Jeunesse
Le moment où le jeune Virgile revêt la toge virile coïncide avec le deuxième consulat de Crassus et de Pompée, marquant symboliquement le passage à l'âge adulte au moment où Lucrèce, une de ses influences littéraires, disparaît.
Dès son jeune âge, Virgile forge des amitiés durables avec des figures telles que Quintilius Varus, futur grand critique, et Cornelius Gallus, le pionnier de la poésie élégiaque romaine. Ses champs d'études sont très variés. Il a étudié les lettres, la philosophie, le droit, la médecine et les mathématiques. Initié par des figures de l'épicurianisme, il s'est instruit dans des centres culturels éminemment réputés comme Milan, Rome et Naples.
© 2006 Musée du Louvre / Pierre Philibert
Virgile lisant l'Énéide, 1600 / 1700 (XVIIe siècle), Italie ?, ENT 1945.04, Département des Sculptures du Moyen Age, de la Renaissance et des temps modernes; Musée du Louvre, Paris
Sa carrière et ses œuvres
Illustration de la Troisième Bucolique
Ménalque, Damète et Palémon
folio 06r du Vergilius Romanus (Ve siècle)
Incipit des Géorgiques. Feuillet W400.16V des Œuvres de Virgile, par Cristoforo Majorana, Naples, vers 1470. Walters Art Museum, Baltimore
La carrière de Virgile repose sur trois piliers majeurs : les Bucoliques, les Géorgiques et bien sûr l'Énéide.
Les Bucoliques ont été publiées en -37 av. J-C, dans un contexte historique particulièrement tourmenté. Composées dans les premières années du règne d'Auguste, ces poèmes pastoraux offrent un refuge poétique empreint de douceur et de nostalgie au milieu des troubles de l'époque. Alors que Virgile façonnait ces vers, il était confronté à des défis personnels, notamment la menace de perdre son domaine en Cisalpine, une terre qui lui était chère. La redistribution des terres dans le cadre des réformes agraires promues par le triumvirat avait créé un climat d'incertitude pour les propriétaires fonciers, et Virgile se trouva lui-même au bord de la perte de son patrimoine. Ainsi, les Bucoliques, bien que célébrant la beauté pastorale et la vie simple des bergers, portent également l'écho des préoccupations et des angoisses personnelles de Virgile face aux bouleversements politiques de son époque. La plus belle et la plus parlante est sûrement la première qui reprend un dialogue entre les bergers Mélibée et Tityre. L'un perd son domaine et est contraint à l'exil, tandis que l'autre a la permission de continuer à faire paître ses troupeaux en toute tranquillité.
Les Géorgiques, composées entre -37 et -30 av. J-C suite au pacte de Brindes en -40, se présentent comme un traité didactique en vers sur l'agriculture. Elles sont divisées en quatre livres, chacun abordant un aspect spécifique de la vie rurale. Le premier livre se consacre à la culture des champs, le deuxième à la plantation des arbres, le troisième à l'élevage et à la vie pastorale, et le quatrième à l'apiculture. Virgile a écrit ces volumes alors que la péninsule italienne se relevait doucement des guerres civiles qui l'avait frappée et qu'il fallait abandonner le char pour prendre l'araire. Le tout est enrichi de digressions diverses, incorporant des éléments mythologiques tels que le récit du Vieillard de Tarente, le mythe d'Aristée ou encore l'épisode d'Orphée. Ces passages permettent à Virgile de transcender les limites d'un simple manuel agricole pour créer une méditation poétique profonde sur la relation complexe entre l'homme et la nature, avec justesse et empathie.
Et puis il y a bien évidemment l'Énéide , l'apogée de la carrière de Virgile. Et pourtant, ce chef d'œuvre a bien failli ne jamais voir le jour.
On compte aussi les Appendix Vergiliana, un recueil de tous ses poèmes indépendants. On y retrouve notamment le "Culex" où un moucheron sauve la vie d'un berger, les "Dirae" qui sont des malédictions prononcées par un amant chassé de sa terre, l'"Aetna" consacré au volcan Etna, le "Ciris" qui évoque la métamorphose de Scylla en oiseau, et le "Catalepton", un recueil de poèmes courts souvent considérés comme des œuvres de jeunesse de Virgile. Plus tard, des ajouts comprennent la "Copa", un poème mettant en scène une cabaretière syrienne, les "Elegiae in Maecenatem" qui rapportent les dernières paroles de Mécène à l'empereur Auguste, et le "Moretum", un poème gastronomique décrivant la préparation d'un plat local de Cisalpine.
L'Énéide et la mort de Virgile
La mort de Virgile en -19 av. J-C à Brindes marque une période critique dans l'achèvement de son chef-d'œuvre, l'Énéide. Inquiet de la qualité de son épopée inachevée, Virgile aurait même demandé à ses amis de la détruire par le feu. Cependant, son souhait fut contrecarré par le Princeps Auguste, qui, reconnaissant la valeur de l'œuvre, demanda à Lucius Varius Rufus, un poète et ami de Virgile, de la compléter et de la publier. Cette intervention salvatrice a préservé l'Énéide de l'oubli et lui a permis de devenir l'un des piliers de la littérature mondiale et un mythe fondateur incontournable. Lucius Varius Rufus, honorant la confiance d'Auguste, s'acquitta de cette tâche délicate en faisant de son mieux pour respecter l'intégrité artistique de Virgile, contribuant ainsi à la postérité du grand poète romain.
Portrait présumé de Virgile, Gravure de F. Huot dans l'édition des Œuvres de Virgile par l'abbé Des Fontaines, (Paris, Billois, 1802).